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Au premier semestre 2022, nous avons travaillé avec un collectif d’une bonne vingtaine de journalistes (venus de Vert, le média qui annonce la couleur, de Reporterre, le quotidien de l’écologie, mais aussi nos amis de Climax, de Franceinfo, de RFI, sans oublier de Socialter, de Blast le souffle de l’info et bien d’autres encore) afin de rédiger une « Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique ».

 

Image Samsa charte journalisme climat

En 13 points, ce document revient sur les grands enjeux permettant d’améliorer le traitement de tous les sujets liés au climat, au vivant et à la justice sociale.

Cette charte a été publiée en français sur le site https://chartejournalismeecologie.fr/ et on vous en dit un peu plus sur les coulisses de la rédaction de cette charte dans cet article.

En voici l’intégralité : 

Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique

Le consensus scientifique est clair : la crise climatique et le déclin rapide de la biodiversité sont en cours, et les activités humaines en sont à l’origine. Les impacts sur les écosystèmes et les sociétés humaines sont généralisés et, pour certains, irréversibles. Les limites planétaires sont dépassées l’une après l’autre, et près de la moitié de l’humanité vit déjà en situation de forte vulnérabilité.

Dans son sixième rapport, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat  (GIEC) insiste sur le rôle crucial des médias pour « cadrer et transmettre les informations sur le changement climatique ». Il appartient à l’ensemble des journalistes d’être à la hauteur du défi que représente l’emballement du climat pour les générations actuelles et à venir. Face à l’urgence absolue de la situation, nous, journalistes, devons modifier notre façon de travailler pour intégrer pleinement cet enjeu dans le traitement de l’information.

Tel est l’objet de la présente charte. Nous invitons donc la profession à : 

1. Traiter le climat, le vivant et la justice sociale de manière transversale. Ces sujets sont indissociables. L’écologie ne doit plus être cantonnée à une simple rubrique ; elle doit devenir un prisme au travers duquel considérer l’ensemble des sujets.

2. Faire œuvre de pédagogie. Les données scientifiques relatives aux questions écologiques sont souvent complexes. Il est nécessaire d’expliquer les ordres de grandeur et les échelles de temps, d’identifier les liens de cause à effet, et de donner des éléments de comparaison. 

3. S’interroger sur le lexique et les images utilisées. Il est crucial de bien choisir les mots afin de décrire les faits avec précision et rendre compte de l’urgence. Éviter les images éculées et les expressions faciles qui déforment et minimisent la gravité de la situation

4. Élargir le traitement des enjeux. Ne pas renvoyer uniquement les personnes à leur responsabilité individuelle, car l’essentiel des bouleversements est produit à un niveau systémique et appelle des réponses politiques. 

5. Enquêter sur les origines des bouleversements en cours. Questionner le modèle de croissance et ses acteurs économiques, financiers et politiques, et leur rôle décisif dans la crise écologique. Rappeler que les considérations de court terme peuvent être contraires aux intérêts de l’humanité et de la nature.

6. Assurer la transparence. La défiance à l’égard des médias et la propagation de fausses informations qui relativisent les faits, nous obligent à identifier avec précaution les informations et les experts cités, à faire apparaître clairement les sources et à révéler les potentiels conflits d’intérêts.

7. Révéler les stratégies produites pour semer le doute dans l’esprit du public. Certains intérêts économiques et politiques œuvrent activement à la construction de propos qui trompent la compréhension des sujets et retardent l’action nécessaire pour affronter les bouleversements en cours.

8. Informer sur les réponses à la crise. Enquêter avec rigueur sur les manières d’agir face aux enjeux du climat et du vivant, quelle que soit leur échelle d’application. Questionner les solutions qui nous sont présentées.

9. Se former en continu. Pour avoir une vision globale des bouleversements en cours et de ce qu’ils impliquent pour nos sociétés, les journalistes doivent pouvoir se former tout au long de leur carrière. Ce droit est essentiel pour la qualité du traitement de l’information : chacun•e peut exiger de son employeur d’être formé•e aux enjeux écologiques.

10. S’opposer aux financements issus des activités les plus polluantes. Afin d’assurer la cohérence du traitement éditorial des enjeux du climat et du vivant, les journalistes ont le droit d’exprimer sans crainte leur désaccord vis-à-vis des financements, publicités et partenariats média liés à des activités qu’ils jugent nocives.

11. Consolider l’indépendance des rédactions. Pour garantir une information libre de toute pression, il est important d’assurer leur autonomie éditoriale par rapport aux propriétaires de leur média.

12. Pratiquer un journalisme bas-carbone. Agir pour réduire l’empreinte écologique des activités journalistiques, en utilisant notamment des outils moins polluants, sans pour autant se couper du nécessaire travail de terrain. Inciter les rédactions à favoriser le recours aux journalistes locaux. 

13. Cultiver la coopération. Participer à un écosystème médiatique solidaire et défendre ensemble une pratique journalistique soucieuse de préserver de bonnes conditions de vie sur Terre. 

Pour en savoir plus sur les coulisses de l’écriture de cette charte, vous pouvez lire ce blog post

Petit lexique du dérèglement climatique
  • Accord de Paris (sur le climat) : l’accord de Paris, souvent appelé Accord de Paris sur le climat, est un traité international sur le réchauffement climatique adopté lors de la COP21 en 2015. Il concerne l'atténuation et l'adaptation au changement climatique ainsi que leur financement. Son objectif est de limiter le réchauffement climatique à un niveau bien inférieur à 2 degrés, de préférence à 1,5 degré Celsius, par rapport au niveau préindustriel.
  • Bilan carbone : outil de mesure de l'empreinte carbone pour comprendre et analyser l'activité des particuliers, des entreprises, des collectivités et des administrations en termes d'émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre.
  • Biodiversité : la biodiversité désigne la diversité des organismes vivants (écosystèmes, espèces, populations…). La pollution des fleuves, des rivières et des sols causée par les activités humaines peut impacter la biodiversité et faire disparaître des espèces animales et végétales.
  • Changement climatique : variations des caractéristiques climatiques - réchauffement ou refroidissement - en un endroit donné au cours du temps. La définition actuelle du changement climatique implique que certaines formes de pollution de l’air, résultant principalement de l’activité humaine, menacent de modifier sensiblement le climat, contribuant à un réchauffement global.
  • Différence entre météo et climat : la météo se définit par quelques valeurs instantanées et locales de température, de précipitations, de pression, d'ensoleillement, etc. Des valeurs qui sont fournies par des stations météorologiques. La science du climat, quant à elle, rend compte des conditions moyennes de l'atmosphère, sur une longue échelle de temps et sur une vaste zone géographique. 
  • Dioxyde de carbone (CO₂) :  principal gaz à effet de serre anthropique (émis par l’Homme) qui affecte l'équilibre radiatif de la Terre. Les émissions de CO2 viennent des énergies fossiles (à 90%) et de la déforestation (à 10%).
  • Éco-anxiété : inquiétude face aux catastrophes écologiques. 
  • Éco-geste : un geste simple du quotidien permettant de réduire notre empreinte écologique tout en faisant des économies d'énergie.
  • Energies fossiles : les énergies fossiles sont le charbon, le pétrole et le gaz. Elles sont utilisées principalement dans les bâtiments, le transport et l'industrie. Elles émettent du CO2 lors de leur combustion.
  • Empreinte carbone : total des émissions de gaz à effet de serre liés à notre mode de vie. Son intérêt est double : comprendre d'où viennent nos activités les plus néfastes pour le climat et agir à notre échelle afin de réduire nos émissions sur certains postes de consommation (alimentation, transports, logement).
  • Gaz à effet de serre (GES) : certains gaz retiennent une part de l’énergie solaire renvoyée vers l’espace par la Terre sous forme de rayonnement infrarouge. Ces gaz dits à effet de serre sont présents naturellement dans l’atmosphère, comme le gaz carbonique (CO2), le méthane (CH4) ou la vapeur d’eau (H2O) mais en trop grande quantité, ils provoquent le réchauffement climatique..
  • GIEC : depuis plus de 30 ans, le GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) évalue l’état des connaissances sur l’évolution du climat, ses causes, ses impacts. Il identifie également les possibilités de limiter l’ampleur du réchauffement et de s’adapter aux changements attendus. Les rapports du GIEC fournissent un état des lieux régulier des connaissances les plus avancées. Cette production scientifique est au cœur des négociations internationales sur le climat.
  • Greenwashing : méthode marketing consistant à communiquer auprès du public en utilisant l’argument écologique de manière trompeuse pour améliorer son image. Les informations transmises sont une présentation déformée des faits et de la réalité. Cela peut aussi bien passer par le fond que par la forme.
  • Réchauffement climatique : la hausse des émissions de gaz à effet de serre (GES) modifie la composition de l'air, provoquant une augmentation de l’effet de serre. La chaleur est piégée à la surface de la Terre, dont les puits de carbone naturels ne peuvent pas absorber autant de GES, et ce déséquilibre entraîne un réchauffement planétaire.
  • Zéro carbone ou neutralité carbone : objectif pour un État ou une entreprise d'atteindre l'équilibre entre les émissions de carbone et l'absorption de carbone de l'atmosphère par les puits de carbone.
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