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Dans le monde des médias, il faut parvenir à gérer ce moment-clé où on lâche la liane du support d’origine pour attraper celle du numérique. Ce “moment Tarzan”, entre certitudes anciennes qui ne tiennent plus et perspectives digitales qui peinent à se dessiner, est porteur d’angoisse et d’inquiétude pour les managers. Un récent rapport du Reuters Institute s’en fait l’écho et confirme les constatations que nous faisons tous les jours sur le terrain chez Samsa.fr. Des solutions existent pourtant et elles commencent à être clairement identifiées.

On ne parle plus seulement d’expériences, de lab, d’innovations éparses et sporadiques. On parle d’un véritable changement. Changement de mode de production, changement de modèle économique, changement de culture au sein des rédactions des médias.

Le Covid-19 est passé par là pour montrer que l’adaptation rapide des médias à un nouveau contexte, à de nouvelles organisations, à de nouvelles contraintes est possible. Le problème, c’est aussi que le Covid-19 est passé par là et qu’il laisse des équipes fatiguées et des managers un peu à plat. La nécessité de recharger les batteries s’impose dans ce moment particulier même si le temps est sans doute l’une des ressources les plus rares de la période.

Au fil des semaines, dans nos discussions avec les managers des rédactions en France, en Suisse, en Belgique, la nécessité du changement n’est plus contestée. La question qui nous est posée est: comment fait-on ?

 

Lâcher la liane du média historique pour attraper celle du “digital”

 

En toile de fond, il y a ce que j’appelle le “moment Tarzan”. Cette sensation très désagréable de devoir lâcher la liane du média historique (presse écrite ou radio ou télévision) pour attraper celle du “digital” aussi incertaine que difficile à saisir.

Comment les rédactions gèrent-elles ce moment ? La chercheuse Lucy Kueng s’est posé la question et elle a interrogé une centaine de directeurs/directrices de rédaction, rédacteurs/rédactrices en chef ou autres managers chargé·e·s de piloter ces mutations.

Le rapport qu’elle vient de réaliser pour le Reuters Institute est passionnant (les liens sont disponibles en bas de page) et il recoupe entièrement les constatations que nous faisons jour après jour chez Samsa.fr lors de nos échanges avec les managers des médias avec qui nous travaillons.

J’en extrais cette citation qui décrit tellement bien la situation qu’ont connue les patrons des médias (et bien d’autres):

Quand un truc comme le numérique arrive, les gens paniquent et se disent « je ne comprends pas ce qui se passe ». C’est comme si vous aviez soudain l’arrivée d’une énorme clientèle chinoise que vous ne comprenez pas. Alors, vous vous dites: « Bon, je vais nommer quelqu’un pour s’occuper de ça à ma place ». 

Cette période de l’homme (ou de la femme) providentiel est désormais terminée et on entend maintenant beaucoup parler de “disruption”. Mais qu’est-ce que ce mot recouvre quand on travaille dans un média ? La réponse tient en 5 points-clés:

  • le leadership doit être totalement revu et les managers doivent changer de posture
  • la culture d’entreprise (et singulièrement de la rédaction) doit être fortement renouvelée
  • les générations Y et Z (les moins de 40 ans) aspirent à trouver une place différente de celle de leurs aînés dans l’entreprise
  • la diversité, l’équité et l’inclusion sont des dimensions à prendre réellement en compte
  • les ressources humaines jouent un rôle important dans cette disruption

Le titre de l’article qui présente le rapport sur le site du Reuters Institute donne le ton : “Low ego and listening”, autrement dit mollo sur l’ego des managers et on se met à l’écoute de ses équipes.

 

 

Manager autrement

 

Les médias portent dans leurs méthodes de management le poids de leur histoire. Une histoire industrielle pour la presse écrite. Une histoire d’ingénieurs et de techniciens du côté de la radio et de la télévision.

Dans ces univers, on doute peu et quand on dirige, on décide d’une main ferme. Et il y a une production à assurer, des pages à remplir, des minutes d’antenne à préparer. Ce mode de pilotage de l’activité prépare peu aux incertitudes de la période.

 

On a commencé à renouveler les produits, pas les organisations

 

Pour commencer, Lucy Kueng s’attaque à l’un des modèles de la transition digitale dans le monde des médias:

Le New York Times a rendu un mauvais service à l’industrie. Il a relevé le défi du passage d’une entreprise traditionnelle au numérique (mise en place précoce d’un paywall, lancement de podcasts, embauche d’une armée de jeunes journalistes capables de remporter un prix Pulitzer et d’une autre de spécialistes des produits et les membres de l’équipe de direction passent tous les vendredis après-midi en réunion de stratégie). Mais réussir un pivot numérique est une anomalie, et les exemples de réussite, s’ils ont des choses importantes à nous apprendre, sont loin d’être simples.

Ce sont les autres qui nous intéressent ici. Tous ceux qui n’ont pas réussi à réunir jusqu’ici la combinaison unique de facteurs qui fait le succès du New York Times. D’autant que les changements nécessaires ne sont pas toujours apparents. Même à l’intérieur d’un média. Les changements de culture d’entreprise notamment sont parfois difficiles à saisir.

Le New York Times: l’arbre qui cache la forêt (Photo: Michal Osmenda CC)

La chercheuse rappelle qu’une stratégie est composée de réponses à des changements et défis venus de l’extérieur, mais aussi de changements internes qui constituent la mise en œuvre de la stratégie.

Savoir ce qu’il faut faire ne signifie pas que vous serez capable de le faire. La majorité des médias traditionnels ont une stratégie (souvent très similaire), mais pour beaucoup d’entre eux, le processus de transformation numérique est très lent. De nouvelles initiatives sont lancées alors que d’autres n’ont pas vraiment abouti 

Lucy Kueng pointe le fait que la plupart des plans stratégiques ne sont jamais réalisés.

Cela est dû à la complexité de la mise en œuvre de la stratégie. Elle implique de passer d’un plan rationnel et réfléchi aux réalités désordonnées de l’action humaine, à l’inertie organisationnelle, à la “politique” interne et aux questions personnelles ingérables.

Nous le constatons aussi en France, en Suisse ou en Belgique. Du Power point “stratégique” à sa mise en musique dans tous les services, les écueils sont multiples. 

Nouvelles compétences et nouvelle posture pour les managers

 

Première recommandation adressée aux managers: mettre leur égo dans leur poche. Aujourd’hui ils/elles ne sont plus censés tout savoir et tout maîtriser. Désormais, les “soft skills” deviennent au moins aussi importants que les “hard skills”. 

Pour réclamer des changements, les managers doivent être en mesure de montrer qu’ils comprennent ce qu’ils demandent et prouver qu’ils/elles sont capables de changer par eux-même, comme l’explique l’un des managers interrogés dans le cadre de l’étude (tou·te·s ont témoigné sous couvert d’anonymat):

Vous devez faire preuve de changement et vous devez vous changer vous-même – et cela se répand ensuite dans l’entreprise … Les PDG n’en parlent jamais – mais si vous ne pouvez pas changer, comment pouvez-vous espérer que votre entreprise change ?

L’autre mutation importante consiste à dire que l’on ne sait pas quand, effectivement, on ne sait pas. Ce qui va à l’encontre de décennies où les chefs étaient censés savoir. Il est devenu impossible d’avoir une expertise dans tous les domaines concernés par la révolution numérique.

Être à l’écoute, savoir partager ses doutes (souvent mais pas systématiquement), privilégier une approche itérative qui admet les essais/erreurs rapidement corrigés, voilà les nouvelles compétences attendues des managers. Leur rôle s’apparente de plus en plus à celui d’un coach qui motive, qui accompagne et qui fondamentalement se met au service de ses équipes.

La rédaction du groupe Axel Springer à Berlin (Photo: Thomas Schmidt /NetAction CC)

Mieux communiquer en interne: une nécessité

 

On comprend bien que la mutation ne va pas toujours être simple à opérer. D’autant que les managers doivent faire évoluer également leur manière de communiquer. Ils/elles doivent être clairs sur les objectifs stratégiques et sur les raisons pour lesquelles il est nécessaire de s’en rapprocher, mais ils/elles doivent aussi assumer le fait que les objectifs opérationnels et spécifiques peuvent évoluer rapidement.

Faut-il tout dire ou pas ? Question posée quand les orientations opérationnelles peuvent varier, même si les objectifs stratégiques demeurent. L’un des managers interrogés par la chercheuse le traduit avec ses mots:

Il est bon de dire : « nous n’avons pas la réponse, mais nous faisons un pari stratégique ». Cependant cela effraie beaucoup de gens… ils traduisent par « ils ne savent pas ce qu’ils font ».

L’honnêteté et la transparence créent de la confiance, mais elles peuvent aussi générer de la crainte et de l’anxiété. Dans ce contexte, il est raisonnable de laisser certaines idées ou projets atteindre un niveau de maturité suffisant avant d’être endossés comme des objectifs opérationnels.

 

Le travail de sape (parfois silencieux) des opposants

 

Dans le processus de transition numérique, des oppositions souterraines peuvent exister. Des opposants plus ou moins déclarés peuvent opérer un travail de sape. Et avoir un impact négatif plus important encore:

“Les managers qui n’adhèrent pas délivrent une sorte de « laissez-passer » aux collaborateurs pour qu’ils fassent de même.”

Dans ce cas de figure, la recommandation de plusieurs des managers interrogés dans le cadre de l’étude est sans appel:

“Débarrassez-vous des personnes qui bloquent dès que possible… Cela ne changera jamais avec des gens comme ça dans l’équipe.”

Accueillir de nouveaux profils est aussi un enjeu. Les spécialistes de la data (des données) en font partie. Le pilotage par la donnée va en effet devenir un élément décisif de la mise en oeuvre de la stratégie de transformation dans tous ses aspects.

La rédaction de la BBC à Londres (Photo: Deskana CC)

Le rôle-clé du management intermédiaire

Au coeur du processus de transformation, les chefs de service, les rédacteurs en chef et rédacteurs en chef adjoints sont des professionnels aguerris, mais ils/elles doivent aujourd’hui acquérir très vite des compétences complémentaires, comme le souligne ce professionnel interrogé dans le cadre de l’étude :

Vous devez avoir une vision business, être un journaliste, un gestionnaire du personnel, un pilote des compétences et aussi un mentor… Il est vraiment difficile d’être un manager maintenant, parce que vous pilotez un navire très différent de celui sur lequel vous avez embarqué à vos débuts.

Interrogée dans le podcast du site journalism.co.uk, la chercheuse Lucy Kueng précise que l’un des impératifs absolus du moment consiste à réduire et alléger la todo-list des managers, qui est démesurément longue et rend impossible la priorisation des actions.

 

Donner du feedback: une compétence-clé

 

Plus la transformation numérique s’opère, plus la pression du changement s’accroît sur le management intermédiaire. La nécessité s’impose de passer d’un management du contrôle à un management par la confiance. Dans ce contexte, il devient d’une importance critique pour les managers d’être capable de donner du “feedback” à leurs équipes.

Des évolutions qui se heurtent régulièrement à l’absence d’intérêt et de motivation des managers intermédiaires (ou de leur crainte de ne pas être à la hauteur) pour ces nouvelles compétences. Une phrase entendue lors d’une formation Samsa.fr (je cite de mémoire): “Mon boulot, c’est l’info, le reste, on verra bien quand on aura le temps. Pour l’instant, on ne l’a pas”.

La pression sur le management intermédiaire ne cesse d’augmenter au fur et à mesure de la mise en oeuvre de la transformation numérique. Comme la direction du média, ils doivent passer de la responsabilité individuelle à la responsabilité collective, du commande et contrôle au consensus.

 

Changer de culture d’entreprise 

 

Dans le processus de transformation, la culture d’entreprise joue un rôle central. Lucy Kueng estime que “la stratégie définit ce qui doit être fait, mais la culture d’entreprise établit ce qui sera réalisé”.

L’enjeu est central. Changer la culture d’entreprise ne se fait pas en claquant des doigts: c’est changer les réflexes, les références, les habitudes, les routines, mais aussi considérer de nouveaux concurrents, mettre en place des dispositifs de veille efficace, etc.

Le problème, c’est que la culture ne se mesure pas et qu’on ne peut pas la toucher du doigt. Mais pourtant, elle est partout et imprègne chaque décision, et chaque acte de la vie de la rédaction. La culture est dans l’état d’esprit, les attitudes et les comportements.

L’important pour les médias est de parvenir à éviter les erreurs commises dans d’autres secteurs, comme le pointe ce manager interrogé dans l’étude:

Nous agissons comme l’industrie de la musique et toutes ces autres industries qui ont utilisé les mêmes excuses pour éviter d’apporter les changements culturels dont elles avaient besoin pour survivre. Et regardez ce qui s’est passé avec chacune d’entre elles… ce n’est pas quelque chose à imiter 

La rédaction locale de Ouest-France à Rennes en 2011 (Photo: Pymouss CC)

Faire évoluer les valeurs

 

Changer de culture consiste donc à faire évoluer les valeurs de l’entreprise. Au moins à les réinterpréter fortement. Et dans cette perspective, la direction joue un rôle déterminant. Personne ne doit pouvoir échapper à la nouvelle culture.

Chez Samsa.fr, nous avons décidé d’interdire les échanges de mails internes au sein de l’équipe (les mails ne sont utilisés qu’avec des interlocuteurs externes). Et personne n’échappe à la règle, ce qui produit des effets culturels intéressants.

Dans les médias, on observe les mêmes conséquences en imposant des règles nouvelles. Ce que traduit ce manager:

Ne laissez aux collaborateurs aucun endroit où se cacher, car lorsqu’il y a quelque chose de nouveau et de perturbateur, s’il y a une possibilité de continuer à travailler à l’ancienne, même les personnes les plus intrépides auront tendance à le faire en période de stress. Il faut enlever aux gens la possibilité de se comporter autrement. Cela peut sembler extrême, mais si on ne le fait pas la plupart des gens vont se replier sur ce qu’ils connaissent déjà. 

Prise de décision collaborative

 

L’une des manifestations les plus évidentes du changement de culture est le passage d’une prise de décision hiérarchique à une prise de décision collaborative. Une nécessité d’autant plus impérieuse que les décisions à prendre impliquent en même temps des aspects éditoriaux, techniques, marketing et autres.

Et parmi les leviers qui permettent de favoriser les changements de culture se trouve l’exploitation des données, mais ce n’est pas le seul. La prise en compte régulière des données permet de rendre l’organisation plus efficace à condition de compléter les intuitions éditoriales et non de s’y substituer:

Si vous dites : « Plutôt que d’utiliser votre expérience et votre intuition, je veux que vous utilisiez des données », les responsables sont effrayés, franchement. Ils ont l’impression que toute leur expérience des 30 dernières années n’a plus de valeur et n’est plus nécessaire.

Quelle place pour les journalistes de la génération X et Y ?

 

Le rapport traite aussi du cas des journalistes de la génération X et Y (les moins de 40 ans) qui se comportent différemment de leurs aînés. Ils contestent notamment le fait que la décision vienne toujours d’en haut et entendent y être associés.

Même si la notion de génération avec des attitudes et des comportements identiques est exagérée, il n’en reste pas moins que des tendances fortes sont repérables:

  • ils sont nés professionnellement avec les réseaux sociaux
  • ils n’ont connu le secteur des médias que confronté à une crise puissante
  • ils sont particulièrement mobilisés par des sujets comme l’identité, les questions de genre, la santé mentale, le climat, par exemple
  • ils ont besoin de s’épanouir personnellement (en progressant en termes de compétences, de créativité, etc.)
  • ils ont envie de progresser dans la hiérarchie et déplorent que les moyens d’y parvenir ne soient pas exposés clairement
  • ils ont un moindre attachement à l’entreprise, ayant déjà souvent connu des réductions d’effectifs dans leurs expériences précédentes

Leur demande récurrente concerne le feedback sur leur production ou leur activité. Et beaucoup se plaignent de ne pas bénéficier de debriefing/évaluation de qualité de la part de leurs supérieurs. Un défi pour les managers qui ne sentent pas outillés pour ce faire.

La rédaction du Courrier picard à Amiens en 2017 (Photo: BB 22385 CC)

Le défi de la diversité et de l’inclusion

 

Les questions de diversité, d’équité et d’inclusion ont pris récemment une importance croissante, constate l’autrice de l’étude. Ce n’est pas lié directement aux problématiques de transition numérique, mais les changements apportés en réponse à ces différentes questions sont profondément liés.

Le mouvement #MeToo, les enjeux d’égalité salariale homme/femme, étaient une priorité. Mais la trop faible représentation de la diversité sociale, ethnique est en train de devenir une préoccupation croissante sur fond de débat sur la coupure des journalistes avec “le peuple”.

Lucy Kueng note que les rédactions “doivent refléter les publics qu’elles servent et voudraient servir” et pointe le lien avec les stratégies visant à développer l’abonnement dans les médias.

Le lien entre la croissance du nombre d’abonnés, la diversité de la couverture et la diversité des salles de rédaction est devenu évident. Pour augmenter le nombre d’abonnés (un objectif plus pressant depuis que la baisse des recettes publicitaires classiques s’est accélérée), les rédactions doivent attirer différents lecteurs dans différents segments et, par extension, différentes personnes dans la rédaction : si tout le monde se ressemble, pense de la même façon et a des antécédents similaires, il est probable qu’ils produiront le même type de contenu pour le même type de public.

L’importance critique de la gestion des ressources humaines

 

Dans ce contexte, la question du recrutement devient centrale et c’est le dernier chapitre du rapport publié par le Reuters Institute. Question centrale pour les médias: de quel type de profil avons-nous besoin pour cette période de transformation numérique ? Et question pratique: comment recruter pour simultanément accroître la diversité dans la rédaction et intégrer de nouvelles compétences dont les médias ont besoin ?

Recruter est une chose. faire une vraie place aux nouvelles recrues en est une autre. Le rapport abonde en récits de moutons à 5 pattes recrutés par des rédactions qui n’ont pas su les retenir faute de leur donner suffisamment d’espace et de responsabilités pour exercer leurs talents.

 

L’organisation: une question centrale

 

Ce qui pose la question de l’organisation. La stratégie et les business models évoluant, la conception de l’organisation doit en effet être repensée. Les médias se rendent compte qu’ils n’atteindront pas leurs objectifs stratégiques s’ils ne font pas évoluer leur organisation.

Dans ce domaine, les ajustements seront fréquents et jamais définitifs car les évolutions sont constantes dans les usages, dans les technologies, et dans l’articulation des différents services de l’entreprise entre eux.

Au final, la transformation numérique est une transformation des journalistes et une transformation des médias comme entreprises. Autant d’évolutions qui devraient être accompagnées voire pilotées par la fonction RH.

Dans la réalité, c’est rarement le cas. Les responsables des ressources humaines sont peu souvent impliqués au bon niveau dans les transformations en cours. Et c’est régulièrement un manque criant.

Une situation qui trouve aussi son origine dans l’attitude des journalistes, remarque un manager:

Le problème pour les RH est que les journalistes les voient comme des gens qui n’ont pas d’expérience rédactionnelle et pensent qu’ils ne comprendront jamais. Par ailleurs, je pense que les RH ont peur des journalistes car le journalisme reste très opaque.

L’équipe des ressources humaines est aussi perçue comme étant “du côté de la direction”, ce qui n’est pas positif dans des entreprises marquées par des réductions d’effectifs au cours des dernières années.

L’enjeu est donc de repenser la place et le rôle des RH en les positionnant à un niveau plus stratégique, insiste la chercheuse Lucy Kueng.

 

Conclusion

 

La mutation numérique des médias est déjà un enjeu depuis une vingtaine d’années. Une transformation réussie ne passe pas uniquement par des outils et des technologies mais par des questions d’organisation, de culture d’entreprise et d’intégration de nouveaux profils (en termes d’âge et de diversité).

L’impact de la crise COVID-19 a creusé le fossé entre les précurseurs et les autres dans ce domaine, remarque Lucy Kueng:

“Les acteurs les plus avancés sont devenus plus forts, mais le point essentiel ici est qu’ils ont posé les bases de leurs réussites au cours des deux dernières décennies, grâce à des initiatives de transformation interne opiniâtres : en inculquant de nouvelles valeurs culturelles, en améliorant le leadership, en créant de nouveaux métiers, en réinventant les structures. Pour ces organisations, la crise du coronavirus a été jusqu’à présent le moment de récolter les fruits du travail accompli.”

Dans ce domaine, je ne peux que vous recommander d’écouter l’interview de Louis Dreyfus, le président du directoire du groupe Le Monde dans le podcast “Les médias se mettent à table” proposé par Samsa.fr et Ginkio avec la Résidence Creatis.

 

Références

 

L’article qui résume le travail de recherche de Lucy Kueng
https://reutersinstitute.politics.ox.ac.uk/risj-review/low-ego-and-listening-how-expectation-leadership-news-has-radically-changed

Le rapport au format pdf
https://reutersinstitute.politics.ox.ac.uk/sites/default/files/2020-11/Kueng%20-%20Hearts%20and%20Minds%20FINAL.pdf

Le rapport en ligne
https://reutersinstitute.politics.ox.ac.uk/hearts-and-minds-harnessing-leadership-culture-and-talent-really-go-digital#menu

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