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Retour sur une semaine en Côte d’Ivoire à l’occasion de la formation #MondblogAbidjan avec 67 des blogueurs de la plateforme Mondoblog de l’Atelier des médias de RFI. Un projet que j’avais initié il y a un peu plus de quatre ans.

Mes "enfants": 67 blogueurs venus de 27 pays d'Afrique et du monde

Mes « enfants »: 67 blogueurs venus de 27 pays d’Afrique et du monde

S’entendre appeler « papa » est toujours une émotion. Mais lorsque le mot sort de la bouche d’une brochette de jeunes adultes qu’on rencontre pour la première fois, c’est très troublant. J’en fais l’expérience depuis quelques jours entre Abidjan et Grand Bassam en Côte d’Ivoire à l’occasion de l’événement #MondoblogAbidjan et je dois vous avouer que j’ai souvent eu les yeux humides d’émotion.

Grand-Bassam.10Ils sont 67 venus d’Afrique (surtout) et d’ailleurs (un peu). Ils sont de toutes les couleurs. Ils ont comme point commun d’être des « Mondoblogeurs », c’est à dire des participants très actifs du projet Mondoblog que j’avais initié il y a plus de quatre ans avant de quitter RFI et l’Atelier des médias.

Impossible de distinguer l’un plutôt que l’autre. Mais pour vous donner une idée de la richesse de cette famille Mondoblog, je vais vous présenter quelques uns de ceux que j’ai pu rencontrer:

  • Babeth, l’avocate ivoirienne qui livre ses drôles d’ « humeurs nègres » et son regard décapant sur les tiraillement d’une Afrique en pleine évolution;
  • Arthur, le Français installé dans l’incroyable île Christmas en plein Pacifique entre Australie et Indonésie;
  • Sinatou, venue du Bénin et étudiante à Grenoble depuis un an avant —espère-t-elle— de rejoindre l’Ecole de journalisme de Lille dont elle a passé brillamment le concours;
  • David, le facétieux Togolais du Mali qui raconte avec verve les péripéties et manigances de ses contemporains dans la vie de tous les jours;
  • Serge, le Congolais installé au Brésil qui livre son regard politique sur les effets de la mondialisation;
  • Jean-Michel, le « Berlinoir », Martiniquais installé à Berlin.

Et comment ne pas parler de ceux qui ne sont pas là car la « famille » compte 350 membres au total embarqués dans cette aventure depuis 3 saisons:

  • Johnny, le Centrafricain qui a dû quitter récemment son pays en raison de menaces de mort qui pesaient sur lui après l’assassinat de son frère et que Reporters sans frontières vient de désigner parmi les 100 héros de la liberté de l’information dans le monde;
  • Fatoumata, la féministe malienne de Tombouctou qui a décidé de prendre le chemin du blog comme d’autres prennent le chemin de la guerre quand les djihadistes ont occupé sa ville et ont imposé leur loi aux femmes;
  • Florian, le Camerounais au regard piquant sur la situation de son pays;
  • Alimou, le plus célèbre des blogueurs guinéens;
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Dans la salle de formation, un wifi parfois erratique (donc vraiment africain) n’a pas empêché des séances de travail intensives.

 

Emission enregistrée en public à Abidjan

Que les autres me pardonnent de ne pas les citer mais chacun d’entre eux est porteur d’une énergie incroyable et d’une histoire singulière qu’ils expriment tous avec une voix personnelle. Comme je vous parle de voix, vous pouvez aussi les entendre puisqu’ils ont pris d’assaut l’Atelier des médias cette semaine lors de l’enregistrement en public de l’émission à Abidjan.

 

Invité d’honneur de l’émission en tant que « doyen », j’ai dit ma fierté de voir ce qu’est devenu l’embryon de projet que j’avais élaboré avec Cédric Kalonji en 2009. Mondoblog est véritablement né et s’est développé grâce à l’engagement total de Ziad Maalouf et de Simon Decreuze aux manettes de l’Atelier des médias. Mondoblog, c’est encore l’énergie incroyable de Raphaëlle Constant et Manon Mella (mais aussi Pierrick de Morel qui est passé par là l’an dernier) et de Dylette Sadaoui qui a récemment rejoint l’équipe.

La plage et les courants dangereux de l'Océan Atlantique n'ont pas détourné les blogueurs de leurs ordinateurs.

La plage et les courants dangereux de l’Océan Atlantique n’ont pas détourné les blogueurs de leurs ordinateurs.

 

La vie, les envies, les surprises, les enthousiasmes et les colères

Alors, finalement Mondoblog, c’est quoi ? D’un point de vue strictement technique, Mondoblog est une simple plateforme de blogs qui génère plus d’un million de visites par an. Vu de manière dynamique, c’est un dispositif d’apprentissage en ligne de l’écriture (ou plus largement de l’expression) sur le web) —une sorte de MOOC avant l’heure. C’est à dire un dispositif de formation en ligne ouvert à un large public. Mais avec une dimension en plus: celle de miser sur les participants, de croire en eux et de les accompagner.

Vu autrement, Mondoblog ce sont des voix uniques qui s’expriment et racontent la vie, les envies, les surprises, les enthousiasmes et les colères de ceux qui tiennent le clavier. Prendre en main le récit de son quotidien, c’est une manière aussi de prendre sa vie en main notamment pour les Mondoblogueurs africains souvent issus de ces classes moyennes dont l’émergence commence à être visible d’un bout à l’autre du continent.

Mais aucune de ces descriptions ne parvient à décrire la formidable aventure humaine dans laquelle se sont embarqués depuis 3 saisons ces 350 blogueurs francophones qui vivent dans une cinquantaine de pays sur tous les continents. C’est évidemment la dimension la plus difficile à partager. Les Mondoblogueurs se lisent, se commentent les uns les autres et tissent des liens entre eux. En se rencontrant pour la première fois, ils ont l’impression de se connaître déjà. Au total, ils constituent une réseau avec des liens forts et je suis convaincu que beaucoup d’entre eux créeront des projets ensemble dans les prochaines années.

 

Code, Data-journalisme, vérification d'info et ateliers d'écriture au programme.

Code, Data-journalisme, vérification d’info et ateliers d’écriture au programme.

Des formateurs impressionnés par la qualité d’écoute des participants

Au cours des formations dispensées à Grand Bassam près d’Abidjan, tous les intervenants ont été impressionnés par la qualité d’attention et la motivation des participants. Pierre Romera de Journalism++ a ouvert des horizons en décrivant les possibilités du data-journalisme et de la coopération journalistes-développeurs, Grégoire Pouget et Jean-Marc Bourguignon de Reporters Sans Frontières ont été assaillis de demandes sur les moyens d’assurer sa sécurité en ligne (cryptage, navigation anonyme, communications sécurisées) et ils ont partagé quelques rudiments de code, Cléa Kahn-Sriber de RSF Afrique a parlé des enjeux de la protection des journalistes et des blogueurs dans des pays où la liberté de l’information est souvent encore un combat à mener. Julien Pain des Observateurs de France24 a montré comment vérifier l’information trouvée en ligne et notamment les photos et vidéos; pour ma part enfin, je me suis exprimé sur les perspectives d’avenir pour l’Afrique francophone qui doit réaliser le potentiel des nouvelles technologies. Et puis, nous avons relu et retravaillé des textes, bidouillé des blogs, décortiqué des projets dans un foisonnement perpétuel et revigorant.

Au moment de refaire les valises et alors que les premiers participants ont déjà repris le chemin de l’aéroport (certains ont 24 heures de vol avant de rentrer à la maison), c’est la période des au revoir et l’heure des premiers bilans. A titre personnel, et de manière totalement immodeste, c’est la fierté qui domine. Fierté d’avoir joué un rôle dans la naissance de ce beau projet. Cette fierté s’accompagne d’une reconnaissance et d’une admiration sans limite pour Ziad Maalouf qui en incarne totalement l’esprit et qui a su développer Mondoblog au delà de ce que j’avais pu imaginer en traçant les premières esquisses. La dimension incroyablement humaine du projet, il en est l’âme avec Simon Decreuze, Raphaëlle Constant et Manon Mella.

Et les blogueurs ? Mondoblog joue un rôle de révélateur. Révélateur de talents. Chacun d’entre eux aurait trouvé d’autres moyens de se faire entendre si Mondoblog n’avait pas existé. Mais Mondoblog a pu être un accélérateur et un démultiplicateur avec la dimension de réseau en plus. Il faut maintenant quitter la Côte d’Ivoire et les Mondoblogueurs. Je repars très confiant. J’ai hâte de voir ce qu’ils vont devenir dans 5, 10 ou 20 ans. A mon avis, ils nous préparent de belles choses.

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